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Isabelle 1ère de Castille est née le 22 avril 1451 et morte le 26 novembre 1504. Fille de Jean II de Castille et d'Isabelle de Portugal, elle fut reine de Castille et reine consort d'Aragon après son mariage avec Ferdinand d'Aragon en 1469. Isabelle et Ferdinand, les « Rois Catholiques » sont des figures emblématiques de l'histoire espagnole, symboles de l'unité et de la grandeur du pays dont le mythe a été exploité en particulier par l'historiographie nationaliste et la propagande phalangiste en franquiste au cours du XX° siècle.

 

Le saviez-vous ? Ferdinand d'Aragon se dit Fernando de Aragón.

 

L'accession au trône nébuleuse et controversée

Pour prendre du recul par rapport à l'image mythique d'une reine consensuelle symbolisant la cohésion et la grandeur de la nation unifiée, il peut être intéressant de s'intéresser à un moment souvent moins connu de l'histoire d'Isabelle : son accession au trône. Isabelle était la sœur du roi Henri IV de Castille et à la mort de celui-ci le 14 décembre 1574, soutenue par toute la noblesse, elle se proclame reine de Castille. Pourtant, Henri IV avait une fille Jeanne qu'il avait désignée pour lui succéder sur le trône. Alors pourquoi et comment Isabelle a t-elle pu monter sur le trône ? S'agit-il d'une usurpatrice jouant des querelles courtisanes pour prendre le pouvoir ? Ou était-elle réellement légitime pour succéder à son frère ? C'est effectivement le problème de la légitimité de la princesse Jeanne qui est au cœur de la querelle dynastique car, le roi Henri IV ayant la réputation d'être impuissant (l'historiographie nationale le surnommera d'ailleurs « Henri l'impuissant » et il faut rappeler que son premier mariage avait été annulé pour ne pas avoir été consommé), la noblesse mettait en doute sa paternité et soupçonnait la princesse Jeanne d'être la fille naturelle de la reine et du favori du roi Beltrán de la Cueva. Les partisans de Jeanne, soutenue en particulier par le roi du Portugal, arguaient au contraire que ce Beltrán de la Cueva en question n'était pas présent à la Cour au moment de la conception présumée de Juana et ne pouvait donc pas être son géniteur. Derrière ces querelles courtisanes, soupçons d'adultère et intrigues de Cour, il y a cependant de réels enjeux politiques et stratégiques car Isabelle incarnait une possible monarchie forte et unie à la couronne d'Aragon grâce à son union matrimoniale avec Ferdinand. Après une guerre civile de quatre ans, en 1479, la victoire d'Isabelle et ses partisans est manifeste et définitive et la princesse Jeanne se retire dans un couvent à Coimbra au Portugal. Aujourd'hui les historiens continuent à débattre âprement sur la légitimité de Jeanne et d'Isabelle, mais les restes de Jeanne ayant disparu lors d'un tremblement de terre au Portugal, il ne sera malheureusement jamais possible de procéder aux test ADN qui auraient permis de savoir le fin mot de l'histoire.

 

Mariage avec Ferdinand, Reconquête et les débuts de l'unification de l'Espagne

Au XV° siècle, l'Espagne n'est pas un royaume unifié mais se compose de quatre royaumes : celui de Castille, le plus grand, celui d'Aragon, celui de Navarre et au Sud, celui de Grenade, dernier bastion musulman en Europe.

        

        Quand Isabelle et Ferdinand se marient, ils sont encore princesse de Castille et prince d'Aragon, mais quand ils accèdent à leurs trônes respectifs, ils décident de gouverner ensemble sur tous leurs territoires, bien que chaque royaume conserve ses lois et sa juridiction. Cette réunion relatives des royaumes d'Aragon et de Castille à travers l'union matrimoniale d'Isabelle et Ferdinand est considérée comme l'embryon de l'unité de l'Espagne ce qui explique qu'Isabelle soit une figure systématiquement reprise par les mouvements nationalistes tout au long de l'histoire du pays. Ce début d'unification de la Péninsule est complété par la fin de la Reconquête. Le siège de Grenade s'étend de 1481 à 1492 quand le dernier roi musulman Boabdil capitule et quitte Grenade. C'est pour la reconquête de Grenade que le pape octroie à Ferdinand et Isabelle le titre de « rois Catholiques ». Pour parachever la reconquête religieuse, les rois Catholiques obligent juifs et musulmans d'Espagne à se convertir au catholicisme ou à quitter le territoire. Ils mettent également en place l'institution de l'Inquisition : chargée de s'assurer d'une conversion sincère de ces nouveaux chrétiens, l'Inquisiton est avant tout un redoutable instrument de contrôle social. Au niveau des représentations symboliques et mythiques, il est intéressant de voir comment l'Inquisition qui traditionnellement est associée à la torture, la violence et l'intransigeance religieuse et la légende noire de l'Espagne est crée par une figure positivement mythifiée et assimilée à la grandeur de l'Espagne, à la légende dorée, Isabelle la Catholique.

 

 

Le saviez vous : - sur le Reconquête/Reconquista, longue reconquête des royaumes musulmans par les Portugais et les Espagnols entre le VIII° siècle et justement la prise de Grenade par les rois catholiques en 1492.

                         

Légende : on dit que pendant le siège de Grenade, Isabelle fit la promesse                 de ne pas changer de chemise tant que la ville n'était pas tombée,                 le siège ayant duré dix ans, il est totalement impossible de  savoir la part de vérité de cette légende.

                

Autre  légende, celle d'une Isabelle guerrière cette fois-ci, on dit  qu'Isabelle accompagnait toujours Ferdinand sur les lieux des batailles, n'ayant peur d'aucun danger et participant parfois à certains assauts pendant la guerre de Grenade.

                

La guerre de Grenade a duré dix ans, mais il n'y a pas eu dix ans de                 guerre continue car les campagnes militaires n'avaient lieu que du                 printemps à l'automne alors qu'une trêve hivernale était                 rigoureusement respectée.

 

La figure d'Isabelle la Catholique en tant qu'incarnation de la grandeur et du rayonnement de l'Espagne est aussi due à son rôle dans la découverte de l'Amérique. Après avoir présenté son projet aux rois du Portugal et que ceux-ci l'ait refusé, Christophe Colomb vient propose aux rois Catholiques d'appuyer et de financer son projet, ce qu'ils acceptent. A son retour du premier voyage en Amérique, Christophe Colomb est reçu avec les honneurs par les rois catholiques eux-mêmes à Barcelone.

 

      

        

Isabelle la Catholique, figure mythique et enjeux politiques
Isabelle la Catholique, figure mythique et enjeux politiques

Les emblèmes des rois Catholiques

Les symboles héraldiques des rois catholiques sont un joug et des flèches, car le joug qui se dit en espagnol « yugo » commence par la même lettre que Ysabel (selon l'écriture ancienne) et les flèches renvoient au F de Ferdinand. Le joug et les flèches sont réunis dans un blason commun sous le signe de l'aigle de Saint-Jean. Ces trois symboles des monarques catholiques auront une grande postérité et seront systématiquement repris par les nationalismes, en particulier par la Phalange et le franquisme, ce qui est bien le signe du lien idéologique qu'établit le régime franquiste avec la figure mythifiée d'Isabelle la Catholique.

Isabelle la Catholique, figure mythique et enjeux politiques

Une figure récupérée par les idéologies nationalistes et le régime franquiste

La Phalange, est une organisation politique espagnole nationaliste d'obédience fascisante fondée le29 octobre 1933 par José Antonio Primo de Rivera, fils de Miguel Primo de Rivera, ancien dictateur d'Espagne de 1923 à 1930. La Phalange espagnole va reprendre les symboles des rois catholiques, le joug et les flèches, en tant que symbole de la grandeur nationale de l'Espagne. Le régime franquiste, qui plonge ses racines idéologiques dans la Phalange reprendra ses symboles que l'on retrouve dans le blason de l'Espagne pendant la dictature.

Isabelle la Catholique, figure mythique et enjeux politiques

Pendant la dictature, l'historiographie officielle fait d'Isabelle la catholique une figure mythifiée presque surnaturelle et déifiée. L'époque des rois Catholiques est vu comme un âge d'or de la nation que l'idéologie franquiste du national-catholicisme veut ressusciter. La propagande officielle, et ce depuis la guerre civile, va utiliser un certain nombre de références à Isabelle la Catholique, notamment à travers le vocabulaire qui rappelle la Reconquête. Pendant la guerre civile espagnole, le camp des franquistes assimile la reconquête des villes détenues par les républicains à une nouvelle « reconquista » où les républicains, libéraux, socialistes et communistes seraient l'équivalent des musulmans qu'il faut chasser d'Espagne pour maintenir l'unité et la grandeur de la patrie. La guerre s’interprète en terme de croisade contre les rouges et on réactive un discours et une idéologie héritées (ou détournés) de l'histoire et du temps des rois Catholiques. Aujourd'hui encore, la figure d'Isabelle la Catholique est un mythe à la fois adoubé et controversé, selon les historiographes et les idéologies politiques, un mythe qui clive et provoque des débats et a du mal à se détacher des récupérations qui en ont été faites.

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